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Les vents du changementđ
TiÌtulo clicheÌ ? Sim. Mas as vezes a vida precisa de um bom clicheÌ.

Je trouve un peu clichĂ© d'Ă©crire un texte qui s'appelle "Les vents du changement", mais je ne vois pas d'autre titre. Le jour oĂč je me suis rendu compte de ce que je vais vous raconter, il y avait du vent. Et je crois que ce sont vraiment ces vents qui ont changĂ© ma façon de penser. Blague Ă part, ce n'Ă©tait pas la responsabilitĂ© du vent, mais plutĂŽt la maturation de quelque chose que je pensais ne jamais arriver. Je crois que j'ai abandonnĂ© l'idĂ©e de faire un doctorat.
Je n'ai pas beaucoup parlé de ce sujet, car c'était un grand objectif dans ma vie. En 2023, aprÚs avoir terminé mon master, cela n'a pas marché, et en 2024, encore une fois, ça n'a pas marché non plus. Ce sujet me causait beaucoup de douleur et d'anxiété, alors je ne l'ai jamais vraiment partagé sur les réseaux sociaux. Mais maintenant, j'ai décidé de le partager avec vous, ce petit groupe sélectionné qu'est cette newsletter.
J'ai toujours rĂȘvĂ© de faire un doctorat depuis 2016. Lors de mon premier cours de linguistique, je me suis dit : "C'est ça que je veux faire de ma vie." Je voulais faire un master, un doctorat et devenir professeure d'universitĂ©. Je suis venue en France pour poursuivre ce rĂȘve, mais beaucoup de choses se sont passĂ©es. En 2023, jusqu'au jour de ma soutenance de master, je pensais pouvoir postuler pour un doctorat avec un professeur. Mais au dernier moment, cette personne s'est retirĂ©e. Il Ă©tait alors trop tard pour trouver un autre encadrant, et j'ai ratĂ© le concours cette annĂ©e-lĂ .
En 2024, j'ai trouvé un autre professeur qui aimait mes idées, et nous avons commencé à travailler ensemble. Mais aprÚs quelques échanges, il a disparu, ne répondant plus à mes mails. J'ai donc encore une fois raté l'opportunité de postuler pour un financement. à Toulouse, on ne peut postuler que l'année de son diplÎme et l'année suivante, donc mes chances s'étaient épuisées.
Je me suis alors demandĂ© si je voulais vraiment revenir dans cet environnement acadĂ©mique. Le jour oĂč j'ai assistĂ© Ă une soutenance de thĂšse, de quelquâun qui a toujours Ă©tĂ© un amour avec moi, rien ne semblait se connecter pour moi. Les professeurs qui m'avaient enseignĂ©e me traitaient comme une inconnue. J'ai trouvĂ© ça horrible, et je me suis demandĂ© : "Est-ce que je veux vraiment retourner dans cet environnement ?" Les questions qui lui ont Ă©tĂ© posĂ©es, le fait quâelle a du changer son sujet plus dâune fois Ă cause de X ou Y⊠Rien ne me semblait bien. MĂȘme les murs de la fac Ă©taient bizarres pour moi.
En prenant du recul (et aprĂšs quelques heures en pleurs), j'ai rĂ©alisĂ© que je n'avais peut-ĂȘtre pas besoin d'un doctorat pour ĂȘtre heureuse. Et en Ă©tant honnĂȘte aussi, je n'ai pas la nationalitĂ© française. Donc je ne peux pas passer un concours public aprĂšs un doctorat et un post-doc. Et, comme au BrĂ©sil, mĂȘme si on peut passer un concours public, la rĂ©alitĂ© de la plupart des professeurs est de passer d'une universitĂ© Ă une autre, d'une ville Ă une autre, en Ă©tant toujours professeur remplaçant. Et j'aime mon travail. J'aime le potentiel crĂ©atif que je trouve dans tout ce que je fais, notamment dans le marketing de mon travail - lâInstagram. J'aime le produit que je suis en train de dĂ©velopper maintenant et que les gens vont bientĂŽt le dĂ©couvrir hehe. J'aime ĂȘtre en contact avec une designer, choisir les couleurs, dĂ©cider ce qui va arriver chez les gens avec soin, amour. J'aime crĂ©er. Et le jour oĂč j'ai assistĂ© Ă cette soutenance de thĂšse lĂ , je n'ai vu aucune crĂ©ation autonome. Aucune puissance de libertĂ© et crĂ©ativitĂ©.
Ma psychologue parle beaucoup de la crĂ©ativitĂ© et de la maniĂšre dont on est de plus en plus privĂ© de notre crĂ©ativitĂ© dans ce systĂšme capitaliste qui nous prend tout notre temps et argent. Dans le doctorat, on ne crĂ©e pas. Ce qu'on produit dĂ©pend en fait de la ligne Ă©ditoriale de l'universitĂ© et du directeur de thĂšse. On ne se montre pas dans ce travail. On n'apparaĂźt jamais Ă 100 % dans ce qu'on fait. Et c'est normal, c'est acceptable - dans tous les mĂ©tiers câest comme ça. Mais faire un doctorat sans financement, qui prendrait plus de temps aussi, pour faire quelque chose qui n'est pas exactement ce que je veux, est-ce que ça en vaut vraiment la peine ?
Mon copain m'a dit une phrase qui m'a fait ouvrir un peu les yeux : "Tu es suffisamment intelligente pour ne pas avoir besoin de faire quelque chose qui prouve que tu es intelligente." Et je pense que c'est ça. Mais, en mĂȘme temps, j'ai commencĂ© ce texte en disant que je pense que je ne veux plus faire de doctorat. Parce que j'ai cru pendant si longtemps que c'Ă©tait ce que je voulais faire que ne plus vouloir de cette rĂ©alitĂ© est trĂšs choquant. Et maintenant, je vais dire quelques raisons pour lesquelles je ne veux plus de cette rĂ©alitĂ©.
AprĂšs avoir finalement arrĂȘtĂ© de jongler entre les Ă©tudes et le travail, ce que j'ai fait pendant la moitiĂ© de ma licence et pendant tout mon master, j'ai commencĂ© Ă avoir plus de temps. Et une des choses que j'ai commencĂ©es Ă faire, c'est danser. Pendant mon adolescence, j'avais pris quelques cours de danse, mais on n'avait jamais assez d'argent pour que je puisse rester longtemps dans ces endroits. Donc, j'ai toujours adorĂ© danser mais on nâavait pas dâargente, solution : je dansais chez moi ! J'Ă©coutais ces DVD pirates qu'on achetait 5 reais chez le camelĂŽ au coin de la rue, et je passais mes journĂ©es Ă danser, j'adorais ça. Danser a toujours Ă©tĂ© quelque chose que j'ai voulu faire. Et depuis l'annĂ©e derniĂšre, je danse au moins deux fois par semaine. C'est l'expression de qui je suis, tout en reprĂ©sentant beaucoup d'autres choses. Le mouvement du corps est l'une des plus belles choses que nous sommes capables de faire en tant qu'espĂšce humaine. En tout cas, c'est ce que je crois.
J'ai aussi commencĂ© Ă faire de la plongĂ©e. Et plonger a toujours Ă©tĂ© une rĂ©alitĂ© que je pensais ne jamais pouvoir rĂ©aliser. Je pensais que c'Ă©tait extrĂȘmement cher, que je ne pourrais jamais le faire, et ce n'est pas nĂ©cessairement bon marchĂ©, mais ça ne veut pas dire que c'est impossible. Aujourd'hui, je sais que je peux le faire. Et pour ça, j'ai aussi besoin de temps. En plus de ça, aujourd'hui je peux voir mes amies, prendre un cafĂ©, partir en petit voyage en montagne le week-end avec mon copain, respirer de lâair frais⊠Et, en plus, je suis dans la ville que j'aime. J'ai dĂ©jĂ changĂ© de pays. Je n'ai pas envie de changer de ville encore une fois. J'ai construit une nouvelle base ici, avec de nouveaux amis qui sont ma famille ici. Et je ne veux pas ĂȘtre ailleurs. Je ne veux pas dĂ©mĂ©nager Ă nouveau.
Mes options seraient soit de faire un doctorat sans bourse qui durerait six ans, oĂč je devrais partager mon temps entre la recherche et le travail, ce qui me plongerait Ă nouveau dans un cycle absurde de stress et de surcharge de travail, pour qu'Ă la fin, mon travail serve Ă d'autres pour gagner de l'argent dans l'industrie pharmaceutique (parce que c'est ce qui se passe avec nos recherches en sciences humaines). Ou alors, je pourrais quitter la ville et trouver un doctorat ailleurs, oĂč je pourrais avoir un financement, oĂč cette rĂšgle absurde de l'Ă©cole doctorale de Toulouse n'existerait pas. Mais je ne veux pas partir d'ici. Et je ne veux pas partir parce que je ne veux pas quitter la vie que j'ai dĂ©veloppĂ©e, tout ce que j'ai rĂ©ussi Ă construire ici.
Et si ce sont les deux seules options que j'ai, quand je fais le bilan, le doctorat n'a plus autant d'importance pour moi. Je sais lire des textes acadĂ©miques. Je sais Ă©tudier seule. Est-ce que j'ai vraiment besoin d'un diplĂŽme ? Est-ce que j'ai besoin d'un papier pour accrocher au mur ? Parce que ce serait juste un papier de plus Ă accrocher au mur. Avec ce doctorat, je n'obtiendrais probablement pas un poste dans une universitĂ©. Ou si je le faisais, ce serait dans ce systĂšme dont j'ai dĂ©jĂ parlĂ©, Ă sauter de ville en ville. Est-ce vraiment ce que je veux ? Et oĂč est ma crĂ©ativitĂ© ? OĂč est-ce que je m'exprime ? C'est fou de penser que moi, qui ai toujours fonctionnĂ© trĂšs bien dans le cadre acadĂ©mique, j'ai dĂ©cidĂ© de m'en libĂ©rer. Ce cadre ne me correspond plus.
Un jour, un ami m'a dit que j'Ă©tais la candidate parfaite pour l'universitĂ©. Je le trouvais un peu fou Ă l'Ă©poque, et j'Ă©tais prĂ©occupĂ©e Ă cause de lâiniciação cientĂfica. - il y avait d'autres personnes qui voulaient travailler avec le mĂȘme professeur que moi. Et il m'a dit : "Ne t'inquiĂšte pas, tu es la candidate parfaite." Je lui ai demandĂ© pourquoi, et il m'a rĂ©pondu : "Tu es exactement ce qu'ils veulent. La personne sĂ©rieuse, bien organisĂ©e, qui va faire exactement ce qu'ils attendent, qui va tout donner de soi, de qui ils vont aspirer lâĂąme, et qui, Ă la fin, va encore dire merci." Ăa va peut-ĂȘtre sembler comme un discours de rebelle adolescente, mais je crois que j'ai dĂ©cidĂ© de ne plus ĂȘtre cette candidate parfaite.
Toutes ces activitĂ©s que je fais aujourd'hui m'ont, d'une maniĂšre ou d'une autre, libĂ©rĂ©e. Alors oui, c'est risquĂ© d'ĂȘtre entrepreneure, surtout dans un autre pays, avec pour seule vitrine de mon travail un compte Instagram. Mais cette fois, je choisis de prendre le risque, parce que ce que je poursuis, avant tout, c'est ma libertĂ© et le droit de ne plus ĂȘtre la âcandidate parfaiteâ.
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D'ailleurs, si tu as lu jusqu'ici, merci beaucoup, haha, et surtout : bon courage pour tes propres changements. Câest difficile de poursuivre nos rĂȘves, mais câest tout aussi difficile dâadmettre quand un rĂȘve ne nous convient plus. Nâoublie pas que tout est temporaire. Ma psy me parle souvent de ça : nos dĂ©cisions ne sont pas Ă©ternelles. On abandonne des projets, on en commence dâautres, et on change un peu chaque jour. Tout peut Ă©voluer. Peut-ĂȘtre que demain, jâaurai Ă nouveau envie de faire un doctorat, et peut-ĂȘtre que toi, tu reviendras Ă un rĂȘve dâenfance. Nous avons toujours le temps. Câest le capitalisme qui veut nous faire croire que la vie doit ĂȘtre plus agitĂ©e et prĂ©cipitĂ©e quâelle ne lâest rĂ©ellement âš.